Mon congé création d’entreprise validée me voila qui me lance dans l’entreprenariat au Cameroun en juillet 2010. Je confie à un cousin du village la lourde tache de me trouver des bureaux dans le centre ville de Yaounde. Il tombe sur une opportunité pas loin de la rue ou j’ai passé les 6 premieres années de ma vie, le marché central. Plusieurs mois avant mon arrivée il m’avait annoncé une avenue un peu plus prestigieuse, mais bon, visitons les locaux avant de nous faire un avis.
Quand j’élaborais mon business plan je me disais qu’un cabinet de formation (activité initiale) devait être situé au coeur d’une capitale pour bénéficier d’une certaine crédibilité et afficher un certain standing pour attirer les clients, mais visiblement le quartier etait mal choisi.
La rue est bruyante, les boutiques y diffusent de la musique toute la journée via de grosses enceintes, impossible de se concentrer ni d’avoir un échange de qualité avec un client, encore moins pour y faire de la formation. D’ailleurs je n’ai toujours pas perçu l’efficacité marketing de cette méthode. Elle est sensée attirer les clients m’a-t-on dit… Vers 18h à la tombée de la nuit, la rue se transforme : prostituées, clients et délinquants occupent les lieux. Ah J’oubliais il y’avait un hotel de passe juste en face de l’entrée de l’immeuble…Je l’ai compris quelques mois plus tard, en demandant un jour à un collaborateur pourquoi l’hotel affichait un tarif appelé “sieste”.
Alors que je pensais avoir envoyé de l’argent pour la location de bureaux dans l’avenue Ahmadou Ahidjo, je me retrouve dans une zone commercante entouré de vendeurs de téléphones, d’électroménagers, de meubles, de vêtements….Quand j’annonçais à un prospect la localisation des bureaux j’entendais toujours un léger étonnement dans la voix, mais je n’arrivais pas à déterminer si il était positif ou négatif.
Mon enseigne posée, les 1ers recrutements à peine bouclés, je recois la visite des impôts, de la régie publicitaire et des agents de la Caisse nationale de la prévoyance sociale (CNPS), qui inscrivent sur place mes collaborateurs et les autres me font payer des taxes avec biensur des montants gonflés.
La nouvelle qu’un “Mbenguiste” etait venu ouvrir une entreprise circulait dans le quartier, du coup au lieu de recevoir des clients, on venait me faire des propositions de business les unes les plus farfelues que les autres. Je me souviens d’un militaire, capitaine je crois qui disait avoir une plantation d’huile de palme et qu’il était à cours de finances pour finaliser sa récolte. Si je lui faisais un pret il partagerait une partie de la récolte avec moi… Je voyais défiler dans mon bureau à longeur de journée : la famille proche et tres éloignée qui venait demander de l’argent, et des hommes d’affaires avec des business douteux… Certains me demanderont si je n’avais pas une assistante pour effectuer un filtre, oui j’en avais une mais la plupart m’était présenté par des gens de la famille ou mes collaborateurs…
A l’époque l’ADSL n’était pas encore populaire donc on utilisait des clés internet avec un débit extrenement lent. Chacun de mes collaborateurs avaient une clé et un pc portable. Certains en utilisaient un pour la 1ere fois malgré leur Master et leurs précédentes expériences professionnelles. Du coup pendant leurs débuts ils passaient plus de temps sur Facebook et les sites de recherches d’emploi (nous n’etions pas encore dans le recrutement) que sur les dossiers que je leur donnais. Etant à la fois technicien, manager et patron je n’avais pas le temps de faire de la discipline. Je ne m’attardais par sur la productivité quotidienne mais hebdomadaire ou je passais un savon à certains. Je me souviens que certains employés venaient meme travailler le samedi et le dimanche quand nous avions l’ADSL, ils invoquaient vouloir rattraprer leur retard mais en réalité je me rendrais compte un peu plus tard que c’était principalement pour profiter de la connexion internet. Et donc rechercher un autre job pour quelques uns et pour d’autres faire leur business. En gros je payais des gens qui voulaient me quitter.
Ces petites mésaventures (j’en connaitrai de plus grandes) m’ont permis au fil du temps de mieux cerner les réalités de ce pays ou j’y suis né mais ou je n’ai pas grandi.. A suivre…